Calibration: suite et fin?
1 : Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement
(LSCE)
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En paléoclimatologie, l'utilisation des calibrations linéaires empiriques montre des faiblesses en matière de précision. Ceci est d'autant plus vrai que le support des traceurs est constitué de biominéraux. Depuis Darwin, tout le monde s'accorde à reconnaître que le monde vivant a horreur de l'équilibre. Il en est de même pour les dépôts minéraux sécrétés par un animal, un végétal ou la symbiose des deux; la biominéralisation se fait hors équilibre thermodynamique et/ou chimique. Cette évidence découle de la longue approche que j'ai menée sur le squelette des coraux, animaux qui vivent en symbiose avec des algues. Bien que les valeurs géochimiques soient de toute évidence systématiquement décalées par rapport aux valeurs mesurées sur de l'aragonite inorganique, les calibrations effectuées sur ces échantillons donnent des pentes tellement proches des valeurs attendues, que les "effets vitaux" sont balayés et les équations empiriques adoptées. Cependant, les résultats ainsi obtenus contiennent des incohérences peu compatibles avec les exigences de précision que l'on doit attendre de tels outils. J'ai alors cherché à comprendre ce qui se cache derrière le terme vague d'effet vital, outre notre ignorance. J'ai mis en œuvre la combinaison cultures et mesures à micro et macro échelle de taille afin de relier physiologie et microstructures minérales, puis par up-scaling (donc intégration) croissance de l'organisme, forçage externe et réponse biogéochimique, tout en considérant les multiples études effectuées sur le terrain et publiées. J'en conclus que la situation est loin d'être désespérée. Quelle que soit la nature du minéral ou du support, nous disposons de plusieurs indicateurs différents (isotopes stables, éléments trace, densité ....). Chacun des traceurs présente un transport, une incorporation, un fractionnement chimique qui diffèrent, cependant ils obéissent tous au fonctionnement unique inhérent à la biologie de l'organisme qui les porte. Des relations existent entre la part organique et la part inorganique du matériel étudié qui elles-mêmes s'établissent suivant des règles physico-chimiques qui souvent nous échappent. Malgré tout le système possède une forte cohérence. Pour un organisme donné, une combinaison unique d'indicateurs correspond à un seul forçage externe. Les traceurs géochimiques évoluent au cours du temps en synergie face aux paramètres environnementaux et possèdent entre eux des connexions cachées. C'est ce système de multi-traceurs que nous pouvons alors utiliser. Les réponses du monde vivant aux forçages externes sont multiples; il y a autant de solutions que de type d'organismes. Il faut alors mettre sur pied la solution mathématique et/ou statistique la mieux adaptée aux caractéristiques de l'organisme étudié.